Depuis son dernier album Stone Rollin’ publié en 2011, on attendait impatiemment des nouvelles du maître de la funk, Raphael Saadiq. On se souvient avec nostalgie de l’époque où il chantait aux côtés de D’Angelo ou encore du groupe Tony! Toni! Toné!, qu’il formait avec son frère et son cousin. En 2018 , il obtient sa première nomination aux Oscars, aux côtés de Mary J. Blige, pour « Mighty River » de Mudbound. Mais cette fois-ci, le bassiste et chanteur se livre à cœur ouvert dans un album plus personnel que jamais, mélancolique mais pas que… On vous présente l’émouvant Jimmy Lee.
Qui est Jimmy Lee ?
Jimmy Lee, c’est le nom que Raphael Saadiq a choisi de donner à son nouvel album, mais c’est surtout le nom que ses parents ont choisi de donner à son frère aîné, qui a succombé à une overdose en 1998 et à qui il rend hommage en évoquant son combat. La dépendance, un vaste sujet auquel Raphael Saadiq s’attaque à travers cet album épris de tolérance et qui a pour but d’expliquer, de prévenir, mais aussi d’aider. D’ailleurs, Jimmy Lee n’est pas le seul de ses frères à avoir perdu la vie à cause de ses addictions. Et vous l’aurez compris : la famille, c’est important pour l’artiste d’Oakland.
Un album mélancolique, mais pas que…
Loin de l’étiquette néo-soul qui lui colle à la peau, le nouvel album de Raphael Saadiq se veut plus sombre, plus pop et aussi plus proche de Dieu, ce que l’on remarque dès le premier titre « Sinner Prayer » (les prières d’un pêcheur) ainsi que sur l’interlude gospel « Belongs to God ». L’album évoque aussi l’univers de la prison avec le titre « Rikers Island », un monde que Jimmy Lee, de 13 ans son aîné, aimait dépeindre (Rikers Island étant la deuxième prison la plus importante des États-Unis et la plus grande prison de New York). Raphael Saadiq pose le doigt sur certains aspects sombres des États-Unis, pays issu d’un monde qu’il pense « soûl » dans le titre « This World is Drunk ». Difficile alors de rester sobre dans un environnement aussi à côté de la plaque. On retrouve le roi du rap, Kendrick Lamar sur le titre « Rearview », qui surprend par son « How can I change the world but can’t change myself ? » (Comment puis-je changer le monde, si je ne me change pas moi-même ?) Une phrase forte qui pousse à la réflexion : pas de jugements sur les autres, avant de se confronter à son miroir. Après 8 ans d’absence, on retrouve un Raphael Saadiq assagi, qui se veut réaliste, mais rassurant. Comme quoi, avoir passé autant de temps à se focaliser sur sa vie, à l’abri des projecteurs, lui a permis de prendre un chemin plus réfléchi. On pouvait toujours, en attendant, écouter les artistes dont il a été producteur : la belle Solange, Elton John, John Legend ou encore la BO de la série d’HBO Insecure. Son nouvel album, qu’il a lui-même produit et enregistré au studio Blakesless Recordings à North Hollywood, fait la part belle à un casting d’invités de haute volée, avec notamment Kendrick Lamar, Ali Shaheed Muhammad (de A Tribe Called Quest), Brook D’Leau ou encore le guitariste Rob Bacon, lequel joue sur le single « Something Keeps Calling ».
À retrouver en concert le 19 octobre au Château de la Pépinière à Nancy, ainsi qu’à l’Élysée Montmartre à Paris, le 21 octobre.